Coca-Cola et communication de crise : quelles stratégies pour préserver son image de marque en gestion de crise ? L'analyse de Nitidis.
La communication de crise est un enjeu stratégique pour toute entreprise confrontée à un incident susceptible d'affecter son image de marque. Lundi 27 janvier, Coca-Cola Europacific Partners a dû faire face à une crise après l’annonce d’un rappel de produits en raison d’un excès de chlorate, un sous-produit du chlore. Cette situation a soulevé des interrogations quant à la gestion de la communication de crise du géant des sodas et offre un cas d’étude pertinent pour comprendre les bonnes pratiques en la matière.
« La première communication en situation de crise est toujours déterminante », analyse Laurent Vibert, expert en gestion de crise et fondateur de l’agence Nitidis, spécialisée en communication de crise et média training. Pourtant, la réponse initiale de Coca-Cola s’est révélée imprécise : l’annonce d’un « rappel massif » a immédiatement amplifié l’inquiétude. Quelques heures plus tard, la marque précisait que seuls deux lots étaient concernés en France : un lot de Coca-Cola sans sucre en verre consigné (1 L) et un autre de Fuze Tea Pêche 33cl, devant être retirés du circuit de distribution sans nécessité de rappel pour les consommateurs. « À ce stade, l’image de la marque était déjà mise à mal », souligne Laurent Vibert.
En complément, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES) et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont précisé que si le chlorate peut être nocif à haute dose, les quantités détectées dans les produits incriminés restaient en deçà des seuils critiques. Toutefois, l’EFSA rappelle que l’exposition chronique au chlorate peut poser un risque sanitaire, notamment pour les nourrissons, les jeunes enfants et les personnes ayant des carences en iode. L’absence d’informations initiales précises sur ces niveaux de risque a nourri la confusion parmi le public, mettant en évidence une gestion perfectible de la communication de crise.
L’une des erreurs clés commises par Coca-Cola Europacific Partners réside dans l’incohérence des messages transmis. Après avoir minimisé la situation, la firme a dû se conformer aux décisions des autorités françaises imposant un rappel officiel des produits concernés. « Une multinationale de cette taille doit anticiper les ajustements réglementaires et adapter son discours en conséquence pour éviter de perdre en crédibilité », explique Laurent Vibert, expert en communication de crise.
Un des aspects fondamentaux en communication de crise internationale est la nécessité d’une lecture locale par marché. Une gestion uniforme des messages ne fonctionne pas lorsque les régulations, les attentes des consommateurs et la sensibilité aux questions de santé publique varient selon les continents et les pays. En Europe, par exemple, les normes de sécurité alimentaire sont plus strictes qu’ailleurs, ce qui nécessite une approche plus transparente et détaillée. À l’inverse, en Amérique du Nord, la gestion de la réputation de la marque prime souvent sur l’alerte produit immédiate.
Des enquêtes menées par des agences de consommation en Europe ont révélé que Coca-Cola avait identifié le problème plusieurs semaines auparavant et retiré certains produits de la distribution avant même l’annonce publique. Une stratégie proactive aurait permis de limiter la crise en amont et d’éviter la perception d’une gestion réactive et désorganisée.
Par ailleurs, Coca-Cola a confirmé que ces anomalies avaient été détectées dans son usine de Gand, en Belgique, où des tests de conformité avaient révélé des niveaux élevés de chlorate. L’entreprise a déclaré qu’elle travaillait en étroite collaboration avec les autorités compétentes pour améliorer ses procédures de contrôle qualité, mais cette information aurait dû être partagée plus tôt dans la gestion de la communication de crise.
Malgré cette gestion hasardeuse, l’incident ne semble pas avoir eu de répercussions financières majeures. Les consommateurs ne se sont pas précipités dans les magasins pour rapporter les produits et l’action Coca-Cola n’a pas connu de chute significative. Cependant, cet épisode a fragilisé son positionnement de marque synonyme de qualité irréprochable.
Des associations de consommateurs, comme UFC-Que Choisir, ont demandé à Coca-Cola davantage de transparence sur les contrôles qualité et les mesures prises pour éviter de futures contaminations. Cette pression médiatique met en évidence l’importance d’une gestion de crise maîtrisée et anticipée.
Laurent Vibert recommande trois approches complémentaires pour améliorer la communication de crise et restaurer la confiance du public :
Enfin, Coca-Cola pourrait renforcer son dialogue avec les autorités de régulation et les associations de consommateurs dans chaque pays concerné pour démontrer son engagement en faveur de la sécurité alimentaire. Une publication régulière de rapports sur ses mesures de contrôle qualité contribuerait à rétablir la confiance et à minimiser l’impact d’une crise future.
Cet épisode rappelle d’autres crises alimentaires majeures, comme celle de Buitoni en 2022 ou encore la contamination des produits Kinder de Ferrero. Dans ces cas, la communication initiale des entreprises concernées a été jugée insuffisante ou trop tardive, entraînant une perte de confiance durable. « Coca-Cola a l’avantage d’être une marque ultra-dominante, mais il ne faut pas sous-estimer les risques à long terme d’une gestion de crise maladroite », prévient Laurent Vibert.
Cet incident met en lumière l’importance d’une approche locale dans la gestion de crise. Coca-Cola aurait gagné à anticiper la crise, en contrôlant son message dès le départ et en évitant toute confusion grâce à une communication adaptée aux réalités de chaque marché.
« Chaque crise est une opportunité d’améliorer sa communication de crise et de renforcer la relation de confiance avec les consommateurs. Un message clair, rapide et ajusté aux réglementations locales est essentiel pour préserver l’image de marque », conclut Laurent Vibert, expert en communication de crise.